vendredi 10 janvier 2014

Centrafrique : Djotodia a démissionné, la population en liesse et après ?


La décision de N’Djamena est tombée en milieu de la journée de ce vendredi 10 janvier 2014 à l’issue de la deuxième journée du sommet extraordinaire des Chefs d’Etats et des gouvernements et des représentants des pays de la CEEAC dont se sont ajoutés, des conseillers nationaux du Conseil National de Transition de Centrafrique déportés dans la capitale Tchadienne dans la nuit du jeudi à vendredi pour entériner la démission de celui qu’on appelle désormais ex-président, Michel Djotodia. Quoique circulant depuis plusieurs jours, la démission du président de la Transition a surpris certains Centrafricains qui redoutaient le pire scenario, c’est-à-dire un compromis de la CEEAC afin de laisser le chef de l’exécutif centrafricain finir la transition. Finalement le peuple centrafricain a eu ce qu’il voulait. Mais si Michel Djotodia a sa horde de mercenaires et se sbires à la gâchette facile ont plongé la RCA dans un chaos indéniable, seul leur départ pourrait faire disparaitre tous les problèmes centrafricains ?

Population de Bangui en chant et en joie
Dans les rues de Bangui, la population a manifesté sa joie de se débarrasser d’un président qui entrera dans l’histoire du peuple centrafricain à cause de multiples de dégâts qu’il a occasionné notamment humains, matériels et financiers. Certaines routes et avenues ont été envahies par une foule interminable de personnes exprimant l’exaltation au paroxysme qui traverse tout le pays. C’est Ferdinand Nguendet qui selon, l’article 23 de la Charte Constitutionnelle assurera la présidence en entendant l’organisation par le Conseil National de Transition qu’il dirige d’une élection pour le nouveau président de la transition dans les 15 jours suivant la démission du président sortant. Hommes, femmes, enfants et vieillards ne pensaient pas avoir vécu ce moment de gloire, un moment où au lieu de ressentir la joie, l’émotion est à son comble et la tristesse sont au rendez-vous. Cette joie subite cache le malaise de chaque famille endeuillée à cause des derniers événements. Mais il fallait exprimer sa joie, la joie de pouvoir rester en vie pour vivre en direct cette décision historique des chefs d’Etat de la CEEAC, des Conseillers du CNT mais surtout du peuple centrafricain qui a exprimé son ralle-bol dz la situation exacerbée par des exactions commises par les éléments de Seleka sur la population civile. Mais si les habitants de Bangui et environs sont sorties de leur cachette pour montrer aux yeux de la communauté internationale que pousser Djotodia à la démission est une action salutaire, le peuple centrafricain reste l’unique gagnant de ce match farouche qui a opposé pendant longtemps la Seleka aux Anti-balakas avec comme cible principale la population civile et dont la première partie vient juste de sonner avec le départ des deux têtes de l’exécutif. Il ne s’agit pas de la victoire des chrétiens qui ont longtemps subies les exactions de la Seleka majoritairement musulmans (car ces derniers ont aussi subi de plein fouet la crise) ni de François Bozize qui a longtemps demandé la démission de son successeur Michel Djotodia et le retour à l’ordre constitutionnel mais une victoire de tous ceux (chrétiens, musulmans et animistes) qui sont épris paix et qui n’aspirent qu’à vivre dans la quiétude et la dignité humaine.

 Risque d’embrasement de la situation
Cependant, si la nouvelle du départ du président et du premier ministre de transition a suscité beaucoup d’enthousiasme chez Centrafrique, elle peut occasionner aussi un embrasement de la situation sécuritaire déjà très volatile. Comme exemple, le puissant dispositif des forces africaines de la Misca et des éléments de l’opération Sangaris n’a pas permis de dissuader les deux antagonistes qui se sont livrés à leur exercice favori : faire des tires sporadiques. C’est ainsi que des détonations à l’arme lourde et légère ont été entendues dans certains quartier de Bangui en fin d’après-midi. On craint également des scènes de pillages et de vengeances de la population chrétienne sur les musulmans mais aussi des représailles des éléments nostalgiques de la Seleka.  On craint aussi que les antibalakas qui ont attaqué ce jour les bases de la Seleka à Bouar et à Bangui puissent profiter de la situation pour semer le chaos. Les forces africaines et françaises ont un grand défi à relever afin d’éviter l’enlisement de la situation.

 L’après-Djotodia doit se passe comment ?
Pour la plupart des Centrafricains Djotodia est celui-là qui a amené le mal sur le sol centrafricain, la Seleka. Ce qui n’est d’ailleurs pas faux. Ce constat est partagé par la plupart des Centrafricains qui croient que la Seleka est venu mettre en cause la paisible cohabitation des deux communautés (chrétienne et musulmane). Mais dire que tous nos problèmes émanant des étrangers n’est que se voiler la face. L’événement de la Seleka aurait au moins permis de dénicher un mal profond qui languissait chez les centrafricains, celui de se mépriser réciproquement. Comme l’a dit une grande-sœur, la Seleka n’a fait que ressortir en surface le comportement belliqueux et antipatriotique de certains compatriotes qui sont mêmes souvent des traîtres de leurs familles.  Ce qui veut dire que dans chaque famille, d’une manière ou d’une autre, nous avons au moins un Seleka qui germait et qui a été accouché. La Seleka aura montré à tous les Centrafricains qu’il faut mettre en cause notre manière de vivre, de penser, de nous aimer, de regarder les choses, de construire notre pays, de rendre la justice, …

 Djotodia est parti oui, mais les problèmes centrafricains ne vont pas disparaitre
Nous avons une opportunité de nous ressaisir et de nous dire que nous sommes nés comme des frères et sœurs et que nous sommes condamnés à vivre ensemble en parfaite harmonie pour le bien de nos communautés. Nous devons apprendre à nous remettre en cause, chose qui n’est pas pratiquée en Centrafrique. Tout le monde doit se remettre en cause, que ce soit les hommes, femmes, jeunes, hommes politiques, autorités religieuses, membres de la société civile, nous devons tous comprendre que nous avons une dernière chance à saisir si nous voulons renverser la tendance. Mais de tout cela, l’illusion que nous avons, c’est de se dire que la démission de Michel Djotodia et du chef du gouvernement de Transition est la solution au problème centrafricain, détrompons-nous. Elle est certes une des solutions à nos problèmes mais nos problèmes sont légions et la solution la plus difficile à appliquer est de se remettre en cause et de prendre conscience de la situation inimaginable que nous venons de traverser. Certes le chemin reste long et rempli d’embuches mais avec la volonté nous pourrions arriver à faire changer les choses. C’est à ce moment-là que nous pourrions être à mesure de prendre notre destin en main, et la destinée de notre pays avec lui pour une Centrafrique unie et prospère.

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